À la frontière du conspirationnisme et du social-engineering, des communautés Internet soutiennent l’investissement de citoyens américains dans le dinar irakien.

Auprès du Daily Beast, site d’investigations en ligne, Hayes Kotseos explique avoir acheté des millions de dinars irakiens au printemps dernier. La Nord-Carolinienne, qui ne cache pas son affection pour Donald Trump, a vu sur le web une vidéo du président en conférence de presse s’exprimait sur les valeurs monétaires : selon elle, il aurait annoncé que « toutes les monnaies auront la même valeur ». Pourtant, sur la vidéo citée, le président américain revenait sur les crispations autour de la dévaluation chinoise du yuan et appelait à un retour du dollar et du yuan à un niveau équitable pour la concurrence.

« Dinnarians »

Toujours selon l’enquête du média américain, Hayes Kotseos est loin d’être seule à avoir investi dans la monnaie irakienne en estimant que Donald Trump l’y encourageait. Il y aurait derrière ce cas singulier, une escroquerie qui remonterait à plus de six ans et soutenue par les réseaux sociaux. Le dinar irakien, qui coûte aujourd’hui, 0,001 $, devrait, selon cette mère de famille, valoir dans un avenir proche 3 ou 4 $ grâce au locataire de la Maison-Blanche.

En 2015, CNBC faisait mention d’une même mythologie économique en enquêtant sur l’achat par des citoyens américains de l’équivalent de 24 millions de dollars de monnaie irakienne. La chaîne économique évoquait l’inculpation d’un groupe d’hommes ayant organisé cette escroquerie en utilisant la fable d’un retour du dinar à un niveau connu à la fin des années 1980.

Cette prophétie économique aurait repris de plus belle en 2015 lorsqu’un prophète autoproclamé en Afrique du Sud, Kim Clement, a annoncé sur Internet l’élection du milliardaire new-yorkais à la fonction suprême et une réévaluation surprise du dinar irakien. En outre, des médias en ligne fallacieux diffusent des invérifiables informations sur les investissements du président dans le dinar irakien. Dans la petite communauté des Dinarians constituée sur les réseaux sociaux — selon une dénomination qui leur est propre –, la croyance d’un retournement quasi magique de la situation économique irakienne est profondément ancrée et galvanisée par l’accession au pouvoir du candidat républicain : « Donald Trump est la clé » écrit sur YouTube un Dinarian.

« À l’aide de la notoriété de la personne ou entreprise usurpée […] les criminels piègent des milliers de donateurs »

L’affaire, panachant conspirationnisme et social-engineering, n’est pas sans rappeler les multiples escroqueries qui fleurissent ces derniers mois en parallèle de la dévaluation du BitCoin. Les pirates-escrocs utilisent les noms de personnalités publiques — principalement Elon Musk — pour tromper leur victime sur les réseaux sociaux.

Ronan Mouchoux, chercheur auprès de Kaspersky Lab, expliquait cette semaine : « En piratant le compte de grandes entreprises ou de célébrités [les cybercriminels] ont propagé des messages invitant les gens à envoyer un petit montant de bitcoins afin de recevoir en échange le montant multiplié par 10, 20 ou 30. À l’aide de la notoriété de la personne ou entreprise usurpée […] les criminels piègent des milliers de donateurs ». L’affaire irakienne démontre que le social-engineering en matière d’investissement monétaire n’a même pas toujours besoin de pirates pour réussir.

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